Rubrique 3: LES ORGANES RÉGULATEURS DES MARCHÉS PUBLICS

27 octobre 2015 Editorial , le débat
Rubrique 3: LES ORGANES RÉGULATEURS DES MARCHÉS PUBLICS

Pour assurer une bonne gouvernance, il importe de faire choix d´une politique d’achat public axée sur une concurrence réelle combinée à une régulation efficace des marchés publics.

D´une manière générale la régulation des marchés publics a un objectif double ; l´un visant l´instauration de la concurrence souvent nécessaire à la croissance économique d´une communauté, l´autre cherchant à concilier la pratique loyale de la concurrence avec les missions d’intérêt général dont sont investis les services publics de la communauté.

C´est dans cette perspective que la Commission Nationale des Marchés Publics (CNMP) fut créé par le décret du 3 décembre 2004 établissant les règles applicables à la passation des marchés publics de Travaux, de Fournitures et de Services. Elle doit assister les différents services publics à préparer leurs marchés et à détecter les infractions aux règles de passation des marchés publics. Concrètement la CNMP doit assurer le contrôle et le suivi de toutes les activités relatives à la passation des marchés publics selon les normes et procédures en vigueur.

Cet Organe régulateur travaille dans le strict respect de la réglementation, c´est-à-dire le cadre juridique dans lequel elle doit exercer la régulation. Sa mission est précisée à l’article 9 de la Loi du 10 juin 2009 fixant les règles générales relatives aux marchés publics et aux conventions de concession d’ouvrage de service public :

« La Commission Nationale des Marchés Publics (CNMP) est l’organe normatif de l’Administration Publique Nationale qui a pour mission d’assurer la régulation et le contrôle du système de passation des marchés publics et des conventions de concession d’ouvrage de service public, sans préjudice de l’exercice des pouvoirs généraux des autres organes de contrôle de l’État. Elle est placée sous l’autorité du Premier Ministre. »

Par son pouvoir normatif, la CNMP exerce une régulation a priori. Elle édicte des règles générales qui encadrent le fonctionnement des marchés publics. Il est nécessaire de préciser pour les lecteurs que la « régulation » est l´action de maintenir un système en équilibre, à un rythme régulier.

A posteriori, la CNMP met en usage son pouvoir de régularisation. Elle corrige les erreurs et les abus. Il n´est pas superflu de signaler qu´en droit la « régularisation » est une mise en conformité d’un acte juridique ou d’un acte de procédure.

Pour accomplir sa mission, la CNMP doit combiner ses efforts avec ceux des commissions départementales des marchés publics (CDMP) prévues dans l´article 16 de la Loi du 10 juin 2009. Ces dernières sont des organes déconcentrés de la CNMP qui doivent exercer des attributions identiques aux siennes au niveau de chaque département du pays. La CNMP a déjà institué deux CDMP respectivement établies dans le Nord et aux Cayes pour contrôler les opérations relatives à la passation des marchés publics dans ces départements.

Le travail de la CNMP et des CDMP est essentiel en gestion ex-ante. Il est pertinent d´édifier les lecteurs sur l´utilisation des termes ex-post et ex-ante .

En gestion exante, les organes régulateurs interviennent tout au long du processus dès que le montant du marché est égal ou supérieur au seuil d´intervention de la CNMP. A chaque étape décisive, l’autorité contractante prend les décisions concernant les procédures et attributions des marchés, les soumet au contrôle et à l’approbation (Non Objection) des organes régulateurs (CNMP, CNDMP ou Bailleur dans le cas de financement étranger). Le processus est contrôlé depuis l´élaboration du Plan de passation de marchés (PPM) jusqu´à la réception définitive des prestations, fournitures ou travaux faisant l´objet d´un contrat. Le PPM prévoit la réalisation des marchés selon un calendrier incluant des délais d´intervention des organes régulateurs. Pour chaque demande de vérification, le délai pour émettre un avis est de dix (10) jours ouvrables à compter de la date de réception des documents. Exceptionnellement elle peut aller au delà de ce délai dans les limites prévus par l´article 62-1 de la Loi du 10 juin 2009 ci-après reproduit:

« La CNMP peut, sous réserve de notification à l’autorité compétente avec motif à l’appui avant l’expiration du délai, prendre un délai supplémentaire d’un maximum de dix (10) jours ouvrables pour émettre son avis; les motifs évoqués par la CNMP devant fondamentalement porter sur la complexité du marché ».

Les organes régulateurs sont tenus de respecter lesdits délais pour ne pas handicaper le processus.

En gestion ex-post, c´est après que les marchés soient réalisés que l´analyse de la procédure suivie est effectuée pour vérifier les prévisions.

Il est très important de souligner qu’au regard de la loi du 10 juin 2009, les marchés relatifs à la sécurité ou la défense nationale ainsi que ceux contractés sous l’obédience d’une loi d’urgence échappent au contrôle ex-ante des organes régulateurs.

En raison de la spécificité et du caractère obligatoire des règles et procédures devant être suivies et appliquées lors de la passation des marchés publics, il importe de doter les intervenants des connaissances de base indispensables à l’exercice de leur fonction. Il est impératif que ceux qui participent à la résolution des différends maitrisent les mécanismes de traitement des recours ainsi que les techniques de rédaction des avis des organes régulateurs ou du Comité de Règlement des Différends (CRD).

Le CDR est un organe de recours non juridictionnel placé auprès de la CNMP pour siéger en cas de différends survenus dans le cadre des marchés publics. Il a pour mission de « rechercher dans les contestations relatives à la passation et à l’exécution des marchés publics et des conventions de concession d’ouvrage de service public, des éléments équitables susceptibles d’être adoptés en vue d’une solution amiable ou de prendre une décision motivée sur les différends qui lui sont soumis dans ces domaines ».

Au moment opportun, nous examinerons de manière approfondie la nature, la mission et la composition du CRD.

Pour conclure il est tentant de dire que l´indépendance des organes régulateurs est essentielle dans le contexte actuel où les besoins de régulation des marchés publics doivent être confiés à une entité affranchie de l’État.

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